J’ai eu la chance de rencontrer Pierre-Yves Lévy en 2015, dirigeant de la Société Outilacier, acteur du négoce technique, qui distribue à une clientèle d’entreprises, de l’outillage et des fournitures industrielles. Plus simplement, cet entrepreneur explique qu’il est quincaillier en B2B. Outilacier emploie 30 salariés, pour réaliser 30 millions d’euros de CA. Le ratio, en termes de CA par collaborateur, est 5 fois supérieur à la moyenne de son secteur. Ces résultats sont le fruit de son management, de sa gestion, et surtout de son innovation collaborative. Je souhaite vous faire partager l’approche à contre-courant de cet acteur positif de son environnement.
La stratégie que je développe doit être respectueuse de tout un écosystème, que ce soit en interne (collaborateur), comme en externe (fournisseur, prestataire et client). Que veut dire être un acteur positif de son environnement, quand on exerce un métier aussi simple que celui de quincaillier ? C’est un métier de distributeur, puisque je ne fabrique rien. On réalise une prestation de service de distribution. On achète des marchandises à des fabricants et on les revend à nos clients.
Notre particularité dans ce milieu de la distribution, historiquement très importateur, tient à notre décision, depuis longtemps, de distribuer prioritairement des produits français, ou à défaut européens.
Être un acteur positif de son environnement, c’est bien faire et bien agir auprès de nos clients comme de nos fournisseurs. Qui sont nos fournisseurs ? Ce sont des petits, moyens et grands fabricants, qui opèrent sur notre territoire, et utilisent la distribution comme moyen de diffuser leurs produits. D’où mon idée de développer un concept de distribution responsable.
‘’Un distributeur responsable sélectionne prioritairement des produits et des fabricants, qui par leurs natures ou leurs actions sont respectueux des valeurs du développement durable, et il sollicite ses clients pour partager ces valeurs’’.
J’ai souhaité faire avancer mon entreprise dans ce cadre, par rapport à une profession qui n’agit pas toujours d’une façon responsable.
Au début des années 1990, la délocalisation de la production en territoires exotiques était à la mode, et c’est à cette époque que j’ai lancé ma stratégie de distribution responsable (à contre-courant). L’importation est bonne quand elle crée de la valeur et qu’elle apporte de la richesse, pas quand elle appauvrit l’écosystème économique au sein duquel nous sommes interdépendants.
Nos fournisseurs peuvent être un jour nos clients, et nos clients peuvent être un jour nos fournisseurs. Pragmatiquement, il ne faut pas que le distributeur scie, par ses actions, la branche sur laquelle il se trouve.
Dans ma réflexion, je n’ai jamais cherché à maximiser les profits de mon entreprise à court terme, mais j’ai toujours cherché à développer une profitabilité partagée, avec nos clients et fournisseurs, ce dont mon entreprise a aussi bénéficié.
Aujourd’hui, on a vraiment besoin de créer de la valeur collectivement. Cette création de valeur peut ses développer à travers des actions collaboratives. Actuellement, tous les grands groupes sont dans une situation globale qui limite leur capacité à innover et à se développer en autonomie, et ils constatent maintenant qu’ils ont besoin de leur environnement, de leur écosystème, pour créer de nouveaux produits ou concepts, pour innover et pour aller plus loin. Seuls, ils n’arrivent plus à se développer. L’innovation collaborative est devenue une nécessité.
Un des supports de réflexion et d’innovation d’Outilacier, pour assurer sa performance et agir positivement sur son environnement, est de travailler en continu sur le principe du « Juste Besoin au Juste Prix ». Ainsi le concept d’innovation collaborative s’illustre parfaitement avec l’exemple du pinceau qu’Outilacier vend à ses clients.
On sait qu’il y a beaucoup de pinceaux qui se fabriquent à l’autre bout du monde dans des territoires exotiques, et pourtant il existe encore des fabricants de pinceaux Français.
À quoi sert un pinceau ? Étaler de la peinture ! Qui n’a pas peint ? Tout le monde s’est déjà retrouvé dans une situation de devoir enlever un poil de pinceau resté sur le support. A devoir l’enlever, puis nettoyer le support, puis les mains, en utilisant un chiffon et du white spirit. La deuxième chose, quand on peint à la verticale, la peinture coule le long du pinceau en arrivant quelques fois sur les mains, et va ainsi autopeindre le manche du pinceau.
Le « juste besoin au juste prix » qu’est-ce que c’est par rapport à cela ? A-t-on besoin d’un pinceau dont le manche est peint et verni ? A priori NON, il se peindra tout seul pendant le travail… A-t-on besoin d’un pinceau dont les poils sont parfaitement sertis ? OUI
Notre fabricant de pinceaux Français a un savoir-faire, dans la sélection des poils et dans leur sertissage sur le pinceau, qui est excellent. Ce qui fait que ces pinceaux ne perdent que très peu leurs poils par rapport à des pinceaux exotiques.
Un pinceau Français, fabriqué sur notre territoire dont le manche reste en bois brut non peint va couter 1 €, là où un pinceau exotique va couter 0,90€ soit 10 centimes moins cher.
Quand on perd un poil sur le support, combien ça coute quand on est un professionnel ? Un professionnel coûte au minimum une trentaine d’euros de l’heure ; donc chaque minute qui passe coûte 0,5 €. Quand on perd un poil, cela prend au minimum 20 secondes entre la récupération et le nettoyage, soit environ 0,15 €, c’est-à-dire 5 centimes de plus que le différentiel de prix d’achat entre le pinceau exotique et le pinceau français. Sachant qu’en plus le pinceau territorial fait travailler des Français, donc il participe à la diminution de tous nos taux de cotisations diverses et variées (chômage, TVA, notion de coût indirect). Notre fabricant de pinceaux de son côté fait en plus vivre un écosystème.
Voilà un bon exemple du juste besoin au juste prix.
Ici Outilacier ne vend pas seulement un pinceau, mais s’inscrit dans une démarche dans laquelle le fabricant et le client sont associés. Fort de cette ligne de conduite, Outilacier agit de la même façon sur d’autres sujets, plus techniques, et propose ainsi avec ces partenaires une approche globale, enrichie de valeurs, pour mieux répondre aux attentes de son client utilisateur. J’aime cette idée de l’innovation collaborative! S’ouvrir aux autres, faire confiance à ses collaborateurs, ses fournisseurs, partager ses réflexions, ses idées sont un excellent moyen de faire bouger notre monde. J’espère à travers cet article vous avoir donné envie de contribuer à innover de façon collaborative avec vos clients, vos fournisseurs et vos collaborateurs.